4e) Chapitre n°10 : I Pourquoi et comment la France fait-elle la conquête de colonies au XIXe siècle ?

En 1914, la France apparaît comme la deuxième puissance coloniale européenne derrière le Royaume-Uni. Afin de comprendre les motivations qui ont poussé la France à entreprendre des conquêtes coloniales et les modalités de celles-ci, nous allons partir de l'exemple de la conquête de l'Algérie par la France qui débute en 1830.

L'incident diplomatique à l'origine de la conquête de l'Algérie par la France :

Les dettes de la France : En 1798-1799, lors de la campagne d’Égypte initiée par Napoléon Bonaparte, deux marchands juifs proposent au Directoire de ravitailler en blé l’armée française. Le contrat est signé et le dey d’Alger avance l’argent pour toute l’opération. Les caisses du Directoire sont vides et le paiement est renvoyé à plus tard. Une fois au pouvoir, Napoléon Bonaparte repousse à la fin de la guerre le paiement. Sous la Restauration, le gouvernement de Louis XVIII rembourse la moitié de la somme. En 1830, le dey d’Alger n’a toujours pas été payé.

"L’affaire de l'éventail" : Recevant le 30 avril 1827 en audience le consul de France Pierre Deval, le dey d'Alger, qui a besoin d'argent, lui demande la réponse du roi de France à des lettres qu’il lui avait écrites. Le consul l'informe que le roi ne peut lui répondre et le dey d'Alger le frappe « deux ou trois fois de légers coups de chasse-mouche ». Cet acte entraîne un incident diplomatique. Le dey refusant de présenter ses excuses, l’affaire est considérée par la France comme un casus belli entraînant l’envoi de bateaux de la Marine française pour bloquer l'accès au port d’Alger en juin 1827. Ce blocus maritime dure jusqu'en 1829, mais aucune négociation n'aboutit et en 1830, le roi Charles X ordonne la conquête d'Alger.

Après avoir lu le texte sur l'incident diplomatique qui a servi de prétexte à la conquête de l'Algérie par la France, vous devez faire la Fiche d'histoire n°23 sur la page de gauche de votre cahier, puis vous vérifierez vos réponses à l'aide de la fiche de correction. Pour les élèves intéressés, il y a une émission de La Marche de l'histoire sur France Inter consacrée à Abd el-Kader, le chef musulman qui a mené la résistance face à la colonisation française en Algérie (28 mn).

La prise d'Alger décidée en juin 1830 par Charles X est une opération de prestige conduite pour gagner en popularité auprès des Français et pour s'emparer des richesses du dey d'Alger. Héritant de cette encombrante conquête, le roi Louis-Philippe Ier hésite entre l'évacuation des troupes (demandée par l'Angleterre et les libéraux français) et leur maintien (voulue par une opinion publique patriotique). L'annexion de l'Algérie est finalement proclamée en 1834. La conquête du reste du territoire commence. Alternant défaites et victoires, l'armée française s'en tient au début à une occupation côtière. Mais, à partir de 1840, le général Bugeaud s'engage dans la conquête du pays tout entier, menant pendant plusieurs années une guerre extrêmement violente à l'émir Abd el-kader, qui mène le djihad contre l'occupation française. Affaibli après la prise de sa smala en 1843, Abd el-Kader est définitivement vaincu en 1847. La conquête française se heurte aussi au peuple kabyle à l'Est du pays, alors que le Sahara au Sud n'est colonisé qu'au début du XXe siècle. 

Si les pertes de l’armée française sont nombreuses (95 000 hommes entre 1831 et 1851), la population algérienne a également payé un très lourd tribut. La guerre, la famine (celle de 1867-1868 aurait fait près de 300 000 victimes) et les épidémies l’ont fait brutalement chuter de 3 millions d’habitants en 1830 à 2,1 millions en 1871.

Recopiez les définitions d'une "colonie de peuplement" et d'un "indigène" sur la page de droite de votre cahier, copiez en-dessous la trace écrite portant sur la colonisation de l'Algérie par la France :

Une colonie de peuplement : Territoire colonisé dans lequel s’installe un grand nombre d’habitants venus de métropole.

Un indigène : Terme employé par les colonisateurs pour désigner une personne née dans le territoire qu’elle habite.

Trace écrite : La colonisation de l’Algérie par la France a d’abord des causes politiques. Elle a été lancée par le roi Charles X, très impopulaire, qui espère restaurer son prestige et la puissance de la France, très affaiblie depuis le Congrès de Vienne de 1815. D'un point de vue militaire, conquérir l'Algérie permet en outre le contrôle de points stratégiques en mer Méditerranée. En 1830, l'armée française débarque en Algérie, qui est une province de l’Empire ottoman, en utilisant un incident diplomatique entre le dey d'Alger et le consul français en 1827 comme prétexte. La prise d’Alger marque le début de la longue et violente colonisation de l’Algérie. En 1847, la reddition de l'émir Abd el-Kader, qui avait pris la tête de la résistance contre les Français, constitue une étape importante dans la conquête du territoire algérien, dont le Sud saharien n'est contrôlé qu'au début du XXe siècle. Les causes de la colonisation de l'Algérie sont aussi économiques : il s’agit pour la France de se procurer des matières premières et de vendre ses produits industriels. Enfin, les Français sont convaincus d’apporter le christianisme et la civilisation à des populations qu’ils jugent moins avancées. La France décide de faire de l’Algérie une colonie de peuplement : de environ 400 000 Français s’installent en Algérie au XIXe siècle, où la France impose des lois spécifiques pour les indigènes, qui gardent un statut juridique inférieur. Des écoles et des hôpitaux sont construits, mais ils ne sont accessibles qu'aux élites de la population algérienne, qui reste majoritairement pauvre et exclue des meilleures terres. 

Afin de mettre en perspective l'exemple de la colonisation de l'Algérie, lisez les documents suivants, puis complétez le schéma de synthèse à l'aide des propositions indiquées et collez-le à droite en-dessous de la trace écrite :

Document n°1 p. 126 : Jules Ferry justifie les conquêtes coloniales :

« La forme première de la colonisation, c’est celle qui offre un asile et du travail au surcroît de population des pays qui renferment trop d’habitants. Il y a une autre forme de colonisation : c’est celle qui s’adapte aux peuples qui ont un excédent de produits. Les colonies sont, pour les pays riches, un placement de capitaux des plus avantageux. Au temps où nous sommes et dans la crise que traversent toutes les industries européennes, la fondation d’une colonie, c’est la création d’un débouché. Messieurs, il y a un second point que je dois également aborder, c’est le côté humanitaire et civilisateur de la question. Il y a pour les races supérieures un droit, parce qu’il y a un devoir pour elles. Elles ont le devoir de civiliser (= faire sortir de la barbarie, améliorer au niveau moral, intellectuel et industriel) les races inférieures. Enfin, si la France veut rester un grand pays, alors qu’elle porte partout où elle le peut sa langue, ses mœurs, son drapeau, ses armes et son génie. Les nations, au temps où nous sommes, ne sont grandes que par l’activité qu’elles développent. » D’après Jules Ferry (député, ancien chef du gouvernement et ancien ministre des Affaires étrangères), discours à la Chambre des députés, 28 juillet 1885.

Le racisme dans les sciences au XIXe siècle :

« Un fait incontestable qui domine tous les autres, c’est qu’ils (les Africains) ont le cerveau plus rétréci, plus léger et moins volumineux que celui de l’espèce blanche, et comme, dans toute la série animale, l’intelligence est en raison directe des dimensions du cerveau. Ce fait suffit pour prouver la supériorité de l’espèce blanche sur l’espèce noire. » Article « colonie » dans le Grand Dictionnaire universel du XIXe siècle, Larousse, 1863-1865.